Un festival, mille regards : dans les coulisses du cinéma avec Ilda Santiago

Le mardi 1er avril, au cinéma Estaçao Net Rio, nous avons eu le privilège de rencontrer Ilda Santiago, directrice et programmatrice du Festival International du film de Rio. Cette femme passionnée est engagée depuis plus de trente ans dans la diffusion du cinéma d’auteur ainsi que dans la découverte de nouveaux talents du grand écran. Elle nous explique son parcours, sa vision des choses, et comment elle fait prendre vie chaque année au renommé festival.

Du ciné club à la création d’un festival

C’est dans les années 1980 qu’Ilda Santiago commence dans l’audiovisuel, avec un petit ciné club projetant du cinéma répertoire avec son collectif de passionnés. Elle met l’accent sur le travail de répertoire mené et le désir de créer un public curieux et prêt à accueillir la nouveauté. Deux ans plus tard, le besoin d’aller plus loin se fait ressentir. “Et c’est là que j’ai commencé à aller à Cannes” nous confie-t-elle.

Après une phase de réflexion, son équipe et elle arrivent à la conclusion que la création d’un festival est le meilleur moyen d’exercer la distribution. Les choses deviennent sérieuses, avec une réelle volonté de faire circuler des films et de créer un lien avec le public. Grâce au public déjà créé par le petit ciné club, il n’est pas difficile de faire venir du monde à leur tout premier festival. Ilda nous parle de ce public, la “génération Estaçao” : “C’est une génération de gens qui aiment le cinéma, qui sont des amants du cinéma”.

Un festival pour relier les mondes

La raison de ce voyage d’étude étant la célébration des retrouvailles France/Brésil, elle nous en dit un peu plus sur l’influence des français dans le développement du cinéma brésilien. Elle souligne par exemple le rôle majeur que les cinéphiles français désormais installés à Rio ont joué pour le cinéma brésilien : “Le Brésil a toujours eu la chance d’avoir des français, des fous furieux du cinéma qui sont venus, qui sont restés à Rio et São Paulo et qui ont un peu fait l’histoire du cinéma français, mais aussi du cinéma européen” nous raconte-t-elle.

Le festival international du film de Rio, dont Ilda est aujourd’hui la directrice et programmatrice, est né dans cette même dynamique : faire découvrir des artistes et transmettre l’amour du cinéma à travers les années. Chaque année, le festival accueille plusieurs dizaines de films, chacun sélectionnés par deux comités distincts : l’un pour les productions brésiliennes, et l’autre pour les films internationaux. Ce système permet de garantir une certaine harmonie entre les films qui sont visionnés, un équilibre entre gros succès et découvertes un peu plus underground. Lors de son explication, elle insiste sur le désir de créer un lien avec le public à travers ces sélections, tout en défendant un art parfois fragilisé par les logiques commerciales..

Une vision généreuse du cinéma

Cependant faire exister un cinéma exigeant n’est pas de tout repos. Le monde de la distribution étant dominé par des logiques commerciales, les films les plus audacieux peinent parfois à se frayer un chemin jusqu’aux grandes salles. Notre interlocutrice nous cite l’exemple du film italien Parthénon, long métrage très mal reçu par la critique et par la suite boudé par les distributeurs ne voulant pas prendre de risques.

Face à ce conservatisme, Ilda propose une autre vision du rôle des festivals : selon elle l’événement ne doit pas servir à l’exercice des goûts personnels de l’équipe organisatrice, mais être un acte de générosité permettant d’ouvrir les possibilités aux exploitants, et aux spectateurs d’élargir leur regard, rendant le cinéma accessible à tous.

Elle nous explique que cette transmission se perpétue aujourd’hui grâce à une nouvelle génération de spectateurs, qui, avec un regard neuf, vont visionner les mêmes films que leurs parents, et ainsi apporter une nouvelle perspective des œuvres. Ilda se dit impressionnée par l’équipe du festival, jeune, curieuse et toujours à la recherche de nouveautés, mais surtout dans le partage d’art : “Et ça ça fait bouger”.

Le Festival international du film de Rio n’est pas seulement une vitrine du cinéma mondial : il est une rencontre entre les cultures, les générations et les sensibilités. Avecl’engagement d’Ilda Santiago, il continue de faire émerger de nouveaux artistes, tout en honorant la mémoire cinématographique. À travers sa programmation généreuse, le festival affirme avec conviction que le cinéma est, avant tout, une affaire de partage.

Naomi Philips

Découvrez notre interview d’Ilda Santiago :

Publications similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *